Permettre de rêver, c’est permettre d’exister : nos rêves, nos idéaux, nos espoirs font partie de notre identité, surtout quand il s’agit de rêver un chez-soi, un lieu, un territoire où l’on se sent accueilli, reconnu, protégé. C’est plus qu’un toit, surtout qu’en celui-ci est une entrée de métro, un refuge, un logement subventionné ou une résidence pour soins médicaux. C’est plus qu’une maison, et ce n’est pas toujours une maison non plus, surtout quand on ouvre la porte aux possibles et qu’on reconnaît la diversité des existences, des manières de vivre. Si vous racontez votre chez-soi de rêve, vous en direz long sur vos valeurs et vos besoins, des questions personnelles bien sûr mais qui rejoignent inévitablement des enjeux de société, communs. Oser interroger les citoyens – sans oublier des personnes en situation d’itinérance, de précarité ou déplacées pour des raisons médicales qu’on entend moins – sur la question du chez-soi, c’est aussi leur donner une place dans ces réflexions qui construisent le monde.
« Ma maison du rêve » (photo : Dorothée De Collasson)
En se joignant à Exeko, les architectes professionnelles Colleen Lashuk et Suzanne Doucet ont souhaité renouveler la réflexion sur la notion de chez-soi de manière inclusive, avec les populations en situation d’exclusion que nous rejoignons, toujours en mode de rencontres improbables. Elles ont travaillé étroitement avec les médiateurs pour arrimer leur projet à travers des ateliers idAction à la Maison du Père et à l’Accueil Bonneau : est-ce que la question allait choquer dans ces lieux? Et au Module du Nord Québécois, résidence dans un YMCA pour Inuit qui viennent recevoir des soins à Montréal sans vraiment avoir choisi d’être là, eux qui proviennent d’une culture traditionnellement nomade? Avec des immigrants réfugiés, des femmes Chez Doris, des autochtones croisés au PAQ ou directement sur la rue à bord de idAction Mobile? La majorité des participants de leur projet n’ont pas choisi l’endroit où ils vivent et se sentent éloignés de l’idée de chez-soi, est-ce que ces questions n’allaient pas exacerber les difficultés de leur présent? Au contraire, les architectes ont été accueillies tout d’abord avec intérêt et curiosité pour leur profession, ainsi qu’avec enthousiasme : certains s’offraient ce rêve pour la première fois, d’autres l’avaient depuis toujours dans le revers de la manche et une certaine fébrilité accompagnait le partage.
Colleen Lashuk et Suzanne Doucet (photo : Dorothée De Collasson)
Environ quarante personnes se sont exprimées en dessins, maquettes ou mots, parfois de manières farfelues, parfois de manières poétiques, mais toujours en résonnance avec leur réalité, et toujours avec ingéniosité. Les déclinaisons sont nombreuses, mais reviennent quelques fois le contact avec la nature, l’importance de l’environnement et d’éco-énergie, d’une certaine indépendance et d’une connexion profonde avec ses valeurs et ses passions. Le projet des architectes a permis de prendre la mesure de toutes les idées qui habitaient les participants, et en les mettant ensemble, en les réunissant dans l’exposition (processus qui s’est voulu inclusif en invitant aussi les participants à réfléchir le pourquoi et l’orientation de l’exposition, et non pas d’imposer un discours sur leurs créations), le projet donne à voir un éventail de possibilités architecturales, et surtout, un éventail de rêves qui nous engagent à notre tour dans la réflexion...
Espace de rêve – Dream Home
Exposition : du 3 au 17 novembre 2015 Vernissage : mardi 3 novembre, 17h à 20h
@YMCA Centre-ville 1440 Rue Stanley, Montréal, QC H3A 1P7
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